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bouhamidimohamed

L’art. 102, la démission et le peuple.

27 Mars 2019 , Rédigé par bouhamidi mohamed Publié dans #-Algérie, #-Armée, #-Politique, #Hirak, #ANP

L’art. 102,  la démission et le peuple.

 

Le lendemain de la demande du Chef de l’Etat-major d’application de l’art. 102, Ouyahia a réclamé à Bouteflika de démissionner. Dans quelques médias les articles qui en parlent n’arrivent pas à cacher une stupeur profonde sur l’ingratitude de l’homme et une indignation non déguisée. Il a défendu le président Bouteflika jusqu’au bout et même dans sa déclaration de politique générale à l’APN. Il a provoqué le peuple en le mettant au défi de manifester et le peuple avait compris que Ouyahia le poussait à la violence et aux excès qui aurait permis au pouvoir de décréter l’état d’urgence ou quelque loi exceptionnelle de ce goût-là. Non seulement le peuple a occupé la rue mais il l’a fait en surclassant Ouyahia sur tous les plans, comme vous l’avez vu.

C’est bien-sûr la même position que celle de Said Sadi, de Louisa Hanoun, du RCD, de Abdallah Djaballah et de quelques autres. Quels points communs partagent ces personnalités qui affichent des positions idéologiques, politiques et culturelles si différentes, voire antagonistes ?

La réponse est difficile. Alors il faut s’en tenir aux faits, aux significations immédiates et aux conséquences constitutionnellement logiques de la demande de démission.

Premièrement la demande d’Ouyahia au président de démissionner signifie que malgré toutes les mobilisations populaires et son rejet total par le peuple, il se considère encore qualifié pour la vie politique et pour une poursuite de sa carrière politique. On comprend mieux que rapidement après la perte de son poste de premier ministre, il a repris en main le RND et obtenu le soutien des responsables de wilaya de ce parti. Et donc le premier fait est que Ouyahia n’a pas reculé d’un iota face aux manifestations, le deuxième est qu’il dispose d’un parti et des moyens pour agir et enfin que sa carrière politique est encore devant lui.

L’intervention de Ouyahia arrive après les déclarations de Saâdani qui l’ont chargé de toutes les tares du règne quasi monarchique du président Bouteflika. Nous assistons donc à une bataille de ténors, champions respectifs de deux clans, ou deux forces, ou deux groupes pour qui le détail constitutionnel est un facteur décisif de victoire ou de défaite. Mais les déclarations des deux hommes ne laissent pas de doutes sur la réalité d’une confrontation. Celles de Saâdani ne laissent aucun doute qu’il s’agit d’une lutte en l’Etat profond qu’il associe à son ennemi intime le DRS et à Ouyahia. Si l’existence de clans ou de groupes opposés au sein du pourvoir pouvait être de la science-fiction, Saâdani vient de donner la preuve de totale réalité.

Pourquoi la démission plutôt que l’application de l’art. 102 ? Et pourquoi cette position commune de Saïd Sadi, de Djaballah, du RCD etc. ?

Parce que l’application de l’art. 102 signifie que l’appareil d’Etat, premier ministère, conseil constitutionnel, assemblée nationale et sénat, responsables en charge  de secteurs sensibles restent en place dans l’actuel rapport de forces qui a consacré la défaite du courant oligarque déjà ancien représenté par Ouyahia face au courant des oligarques qui se sont récemment enrichis représentés par Bedoui.

Pour remettre le compteur à zéro, il faut donc écarter la solution de l’art. 102. La démission du président ouvre par contre des possibilités différentes et alors l’ancienneté des réseaux oligarchiques représentés par Ouyahia leur donne des avantages considérables contre le camp adverse.

L’application de l’art. 102 a l’avantage de ne pas créer de vide, de coupure, dans la continuité de la direction de l’Etat. Mais il  al’inconvénient majeur de garder cette direction au pouvoir par les avantages de la maîtrise des appareils et des rouages.

La démission donne des avantages aux réseaux constitués mais ajoute au paysage actuel, le risque d’une rupture dans les mailles du pouvoir, ruptures favorables à l’intervention étrangère. Le discours d’aujourd’hui deFederica Mogherini qui jure ne pas vouloir s’ingérer mais nous abreuve de conseils dont le contenu essentiel est de ne pas toucher aux contrats, est un signe avant-coureur.

Que peut gagner le peuple dans cette querelle  juridique qui cache une lutte politique ? Rien, car dans les deux cas il n’a pas le temps de se structurer en comités ou en groupes politiques pour transformer sa force et sa protestation en action politique efficace.

La structure juridique actuelle qui ne l’a pas servi dans le passé ne le servira pas non plus aujourd’hui car elle a été construite pour le faire taire et le disperser. S’il n’y a pas abrogation immédiate des lois de la censure et de la répression et s’il n’y a pas abrogation immédiate des procédures policières pour la constitution des partis et associations, il ne peut y avoir de traduction politique de la volonté du peuple.
Quelle peut-être sa voie ? Celle de l’exigence immédiate de lois qui lui reconnaissent les libertés démocratiques d’expression, d’association, de réunions sous le simple mode déclaratif. Sans cette garantie à arracher dans la rue ou par la négociation nous resterons prisonniers des règles et des lois conçues pour nous dominer.
M.B

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